DOMINICI PRÉSENTE SES OPINIONS COMME DES FAITS. HEUREUSEMENT QUE L’AMBASSADEUR US QU’IL ACCUSE A DÉJÁ ÉCRIT SES MÉMOIRES




Pluriel est l’émission préférée d’Ali Bongo. Pour elle aucune dépense n’est trop onéreuse quand il s’agit d’envoyer les compères qui la présentent à l’extérieur, pour ramener de bons éléments télévisuels propagandistes en l’honneur du prince. On poussera même le ridicule en présentant des clochards français comme la preuve que les choses ne sont pas si mal que ça au Gabon des Bongo. Nous y reviendrons. Pour l’instant nous voulons marquer un arrêt sur la diffusion ce Samedi, par cette émission d’une interview de Louis Dominici, ancien ambassadeur de France au Gabon, et un pilier des sulfureux réseaux Pasqua. Dans cette interview Louis Dominici présente la France comme le pays de la raison, celui qui empêcha l’embrasement du Gabon pendant les années 90, et présente en revanche les USA comme le pays qui soufflait sur les braises au Gabon. Heureusement que l’ambassadeur des USA qui est mis en cause, Joseph Wilson IV, a depuis écrit ses mémoires. Afin d'éliminer la confusion, et de pouvoir connaître la différence entre ce qui est vrai et ce qui relève simplement de l'opinion de quelqu'un comme Dominici, nous nous proposons de confronter les dires de Dominici à ceux contenus dans le mémoire de Joseph Wilson IV, dont le titre est « The Politics Of Truth » (La Politique De La Vérité). Nous vous avions déjà présenté ce mémoire dans un billet précédent il y a plusieurs mois déjà, mais nous nous voyons obligés d’effectuer cet exercice pour vous aider à faire la distinction entre faits et opinions, et ne pas laisser la propagande de Pluriel s’établir. Vous en serez alors mieux informés sur les réalités entourant les divers évènements politiques du Gabon.



1. Louis Dominici dit sur Pluriel: « la France a soufflé le froid, pour calmer les choses, alors que les autres (entendez les USA) soufflaient le chaud pendant la période 90-93 ».

Dans son mémoire, de 528 pages, publié en 2005, Joseph Wilson consacre l’essentiel du chapitre 9 à son passage au Gabon. Ce chapitre a pour titre : « All in a Diplomat’s Life-from Gabon to Albania” (ci-dessus). Nous y avons extrait les morceaux choisis suivants dont nous vous donnons les versions originales ci-dessous (pages 191 et 192, en jaune) ; ici nous vous en traduisons l’essentiel:
« Le Gabon restait fermement entre les mains françaises et ils ne comptaient pas lâcher le morceau. Avec son pétrole et ses minerais, le Gabon était une vache à lait pour les français. Le pétrole gabonais appartenait à Elf. Et considérant l’imbrication corruptive entre la France et les élections en Afrique, où des malles d’argents circulaient entre les deux continents, je ne fus pas surpris quand un énorme scandale financier impliqua Elf et les gouvernements gabonais et français. Quand j’arrivais au Gabon, l’ambassadeur de France Louis Dominici y séjournait déjà depuis 12 ans. Les ambassadeurs de France au Gabon servaient pendant très longtemps, ce qui reflétait l’importance de ce poste d’ambassadeur de France au Gabon qui était en fait le vrai pouvoir derrière le trône. Bongo avait été sélectionné par Charles De Gaulle et tous les présidents successifs de la France. C’était leur homme. »




De la page 196 à 197 on peut lire (en jaune):
« Notre relation avec le Gabon commençait à porter des fruits. Les sociétés pétrolières américaines commençaient à s’intéresser au Gabon. Les choses avançaient et cela rendait l’ambassadeur Dominici très nerveux. Je parlais couramment le français et je connaissais l’Afrique francophone et je n’étais donc pas du tout intimidé par la barrière de la langue ou par l’attitude des français. Mais Dominici considérait notre présence comme un danger pour les intérêts français. Il ne comptait pas laisser échapper ce qui était le joyau de la couronne française en Afrique. Les USA avaient des ambassadeurs activistes qui voulaient que le processus électoral soit juste, équitable et transparent. Au Congo, des élections avaient déjà eu lieu, et le favori des français, Sassou Nguesso, avait perdu. Son successeur, Pascal Lissouba, travaillait activement contre les intérêts d’ELF. Les élections se préparaient au Gabon et Bongo semblait en difficulté. L’opposition était très bien organisée. Au Gabon, j’évitais d’être associé à une quelconque tendance politique. Dès le départ, j’ai dit au président Bongo et à l’ambassadeur de France, que les USA se foutaient de qui gagnait ou perdait les élections, à condition que le processus soit libre et transparent ».




Aux pages 199 et 200, on peut lire (en jaune):
« Malheureusement, à mesure que les élections approchaient, Bongo et ses conseillers devenaient de plus en plus paranoïaques, car ils avaient peur de la défaite. Dominici saisi alors le moment pour me mettre les bâtons dans les roues au Gabon. Il se mit à PLANTER DES ARTICLES DANS LA PRESSE GABONAISE qui m’accusaient d’activement soutenir l’opposition gabonaise. Dominici alla jusqu'à m’attaquer personnellement et essayer de me faire expulser du pays. En Novembre 1993, il m’invita à un petit déjeuner chez lui au bord de mer à Libreville. Entre croissants et café, il alla droit au but. Il me répéta qu’une station de radio de l’opposition, soit disant financée par les USA, appelait les gabonais à la haine anti-française et que ses ressortissants avaient très peur pour leur sécurité. Il me demanda d’obtenir de la station de radio d’arrêter ces émissions. Je lui répondis en réitérant que nous ne financions aucune station de radio et que nous ne soutenions de quelque manière que ce soit une haine anti-française et je l’avais déjà dit publiquement dans la presse gabonaise. En Plus nous avions déjà publiquement déclaré n’être en faveur ni du pouvoir ni de l’opposition. Notre position était claire ; nous voulions un processus qui était honnête et juste, quelque soit le vainqueur ou le vaincu. Dominici me dit alors que de toute manière, la constitution gabonaise n’autorisait Omar Bongo qu’a un seul mandat additionnel. Je compris par cette remarque qu’il demandait implicitement aux USA de fermer les yeux sur les élections qui se préparaient et de reléguer la transition démocratique a la fin de son dernier mandat. Par la suite, Dominici fit un rapport à Paris, qui fut cité dans « L’Evènement du Jeudi », dans lequel il affirmait que j’aurais avoué que les USA soutenaient la Radio de l’opposition. »





2 Louis Dominici dit sur Pluriel: « nous avons eu des difficultés avec l’action d’un ambassadeur des USA au Gabon, qui avait choisi d’éradiquer le système sans nous dire ce qu’il voulait mettre à sa place. Il distribua même des petits drapeaux américains à ses compatriotes pour les différencier des français. Son attitude faisait courir des risques à la paix civile au Gabon ».

A ce propos, dans les mémoires de Joseph Wilson IV, on peut lire aux pages 202 et 203 (en jaune):
«Il y avait 3 candidats principaux aux élections, un Fang dont le groupe sur la partie nord du pays représente 40 a 45% de la population ; Bongo qui vient du sud et cette partie du pays compte 35% de la population ; et un candidat des Myèné, au centre du pays, qui comptent environ 20% de la population. Au premier tour, tous s’accordaient à penser que les Myèné voteraient pour leur candidat et que les deux autres blocs ne pourraient être départagés. Il était prévu que si aucun des candidats ne glanait plus de 50% des suffrages, les 2 premiers iraient au second tour. Les français eurent peur qu’un second tour allait signifier la défaite de Bongo. A 23:30 hrs, tard dans la nuit de l’élection, la cour constitutionnelle annonça que Bongo avait reçu 51,17% des suffrages. Les français et Bongo avaient décidé de court-circuiter le processus et de déclarer Bongo élu au premier tour. Il était clair pour moi que les français avaient décidé qu’il n’était pas prudent pour eux d’aller au second tour, et qu’il fallait en finir avec un processus qu’ils savaient de toute manière truqué. Alors pourquoi s’embarrasser à attendre, autant le déclarer vainqueur immédiatement. D’une manière ou d’une autre, Bongo serait président alors pourquoi aller au second tour? Le cynisme des français était ahurissant. L’opposition réagit aussitôt et avec violence. Ses supporters descendirent dans les rues, brulant propriétés et renversant des véhicules. Ma résidence se situait dans un quartier favorable à l’opposition. Plusieurs personnes furent tuées, dont 2 juste en face de ma résidence. Malgré les violences, l’opposition n’avait aucun problème avec les américains. Pour mieux nous protéger, je fis distribuer à tous les américains des petits drapeaux qu’ils devaient placer au pare brise de leurs vehicules. Non seulement l’opposition ne nous en voulait pas, mais en plus ils applaudissaient quand nous circulions. Dominici fut très offensé par cette tactique et alla se plaindre chez Bongo. Quand Bongo me posa la question concernant ces drapeaux, je lui rappelai que ma mission première était la garantie de la sécurité des citoyens américains sur le sol gabonais. Je lui dis ensuite que si Dominici avait tant peur pour ces concitoyens, Bongo pouvait aller lui dire que j’avais a ma disposition un surplus de drapeaux américains que je lui prêterais pour qu’il les distribue à ses compatriotes pour leur protection. Nous en avons bien rigolé à l’idée de voir les français se balader dans Libreville avec des drapeaux américains. Malheureusement, la réponse du gouvernement gabonais, face aux émeutes, fut agressive et idiote. Le ministre de la défense, un cousin de Bongo, déploya des troupes et de l’artillerie autour de la station radio et du domicile d’un des opposants. Ils firent sauter les deux structures dans la nuit. Je suis allé voir Bongo pour lui dire que s’il voulait fermer la station radio et arrêter le leader de l’opposition, la meilleure façon de le faire aurait été d’envoyer ses juristes et non l’armée. Je lui ai dit, arrêtez les si des lois ont été violées, mais ne détruisez pas ».




Chers lecteurs, nous arrêtons ici ce bref compte rendu du contenu des mémoires de Joseph Wilson IV. A sa lecture, vous pouvez maintenant mieux évaluer à leur juste valeur les dires de Louis Dominici sur Pluriel, car ce qui nous a interpelé dans les propos de Dominici est que ceux-ci tendaient à être des opinions, c'est-à-dire une série de jugements de valeur, d’appréciations subjectives qu’il portait sur ces évènements ; en se donnant le bon rôle et rejetant tous les tords du côté de l’opposition et des USA. Quand on sait que les opinions se construisent sur la base d'éléments isolés, à partir de réalités partielles, il nous était indispensable de confronter les deux versions de manière à mieux vous équiper pour déterminer votre propre vérité. Face à des émissions propagandistes comme Pluriel, il faut confronter ces gens aux faits qui sont des informations tangibles, vérifiables et même quantifiables. Chers lecteurs, toute propagande ne résiste pas bien longtemps aux faits.

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