ESTELLE ONDO’S EULOGY TO ANDRE MBA OBAME. L’ORAISON FUNEBRE DE ESTELLE ONO A ANDRE MBA OBAME


Estelle Ondo (photo: Jean Pierre Rougou)





En effet, décédé le 12 avril dernier à Yaoundé au Cameroun des suites d’une longue et mystérieuse maladie, M. André MbaObame, Secrétaire Exécutif de l’Union Nationale.

J’ai jugé utile d’écrire ces quelques lignes pour rendre hommage à un homme dont le parcours rejoint l’Histoire du Gabon, un parcours qui me rappelle que l’Histoire est faite d’abord de cheminements individuels, de convictions pour lesquelles les hommes et les femmes se battent au prix, parfois, de leur propre vie. Oui, M. André Mba Obame a payé de sa vie pour ses convictions.

M. André Mba Obame avait le goût du bonheur pour ses concitoyens. Il croyait aux valeurs de paix, de justice, d’équité et de démocratie. Il croyait aux idées de liberté et des grands principes démocratiques pour les porter. En un mot, M. André Mba Obame était un homme libre, libre de ses choix, libre de ses engagements, libre de sa parole, libre de sa vie. La liberté, c’était sa passion, son idéal.

M. André Mba Obame était un homme généreux et il avait de la considération pour tout le monde. C’était un fédérateur de toutes les couches sociales et de toutes les personnalités pour les incarner. C’est ce qui explique la grandeur d’André Mba Obame. Ce genre d’homme est unique dans une génération.
Mais, Chaque génération rencontre ses épreuves. Celle d’André Mba Obame en a vécu de terribles. La nôtre affronte des crises. Mais aucun défi n’est insurmontable, aucun objectif n’est inaccessible dès lors qu’il y a une conscience, une volonté, une force de les surmonter comme il nous l’a toujours indiqué. C’est pourquoi AMO nous manquera non sans laisser à la jeunesse du Gabon, à la jeunesse d’Afrique – le témoignage précieux qu’une vie, une simple vie peut être utile par les actes accomplis, par les mots prononcés, par les traces laissées.
Monsieur le Président élu de la République Gabonaise, votre leçon de vie ne s’effacera, car cet esprit de la nouvelle espérance que vous avez incarné ne mourra pas, ne mourra jamais. Il a un nom, c’est celui de la Démocratie et de la République, la vraie Démocratie et la vraie République.
Au moment où certains peuvent croire que les lampions se sont éteints, après votre mise en terre, j’ai écrit ces quelques lignes pour rendre hommage à un homme qui a choisi tout au long de sa vie de mettre son génie au service du collectif, parce qu’il pensait que l’on ne progressait que comme cela. C’est un honneur tout autant qu’une douleur rendre cet hommage à une grande voix qui s’est éteinte le 12 avril dernier, mais dont la République n’oubliera jamais ni le timbre, ni les messages visionnaires.

Le parcours de M. André Mba Obame, c’est comme ouvrir un manuel de l’histoire du Gabon. C’est replonger au cœur de ce qui était alors le Woleu Ntem, dans le village de Medouneu, où il naquit par le hasard de l’affection de son père Obame Ndong. C’est dans cette ville où il fut élevé par sa mère, découvre les passions qui allaient forger sa vie. C’est pendant sa jeunesse, également, que naît sa passion pour l’égalité, d’abord avec ses compagnons d’école.

Comme beaucoup de celles et ceux qui ont vécu l’horreur du régime en place, André Mba Obame vient de faire montre de cette si émouvante pudeur, de cette manière de garder pour soi la souffrance personnelle, pour mieux en tirer la dimension historique et ramener l’expérience intime à l’Humain.

Monsieur le Président, vous n’êtes pas mort de mort naturelle, mais vous n’êtes parce que vous avez été assassiné.
Sous le régime des Bongo, que de morts suspects et d’assassinats d’étrangers et de gabonais, dans des conditions jamais élucidées, malgré l'ouverture péremptoire d'enquêtes officielles. Aucune enquête ne s'est jamais refermée sur des coupables et des conditions bien définies.

Là est un trait caractéristique du régime des Bongo. De Germain Mba à André Mba Obame aujourd’hui, en passant par Anges Mba, Ndouna Dépénaud, DjouéDabany, Robert Luong, Ambourouet Avaro, M. Fanguinovény, Joseph Rendjambé, Sam Mvé Ondo, Michel Bomboh, Martine Oulabou, Pierre Mamboundou, Pierre Claver Zeng Ebome, Bruno Mboulou Beka, les 60 morts de Port-Gentil en 2009 et les 39 morts de Libreville les 21, 22 et 23 février 1993. Tous ces morts, même celles qui comportaient d’évidentes signatures du meurtrier, n’ont connu aucune suite. Bien malin qui dira que ces enquêtes se sont refermées sur des coupables clairement reconnus.

Les seules condamnations que nous observons, sont celles des opposants, ainsi que les gardes à vue qui vont au-delà des délais légaux.

Aujourd’hui, nous avons une pensée particulière pour vous monsieur le Président élu, pour vos proches, votre famille, vos amis. Je veux vous dire que votre douleur est la nôtre. C’est la douleur du Gabon, de l’Afrique et du monde entier, c’est la douleur des combattants pour la liberté, à l’exemple de martin Luther King, Steeve Biko, Nelson Mandela, Patrice Lumumba, Amilkar Kabral, Ben Barka… que vous êtes allés rejoindre.

C’est pour cette raison que nous, à l’Union Nationale, nous devons prendre l’engagement, une fois que notre victoire sera effective, de vous conférer le statut d’ancien Président de la République élu en 2009, afin que cela ne demeure pas une simple vue de l’esprit. Nous devons réhabiliter votre victoire de 2009, travers une matérialisation institutionnelle. Bien entendu, cela ne saurait s’accommoder avec le mandat usurpé d’Ali Bongo dont la période passée à la tête de notre pays sera mise entre parenthèse dans l’histoire de nos institutions. Aussi, prenons-nous l’engagement de combattre ce régime, sans répit, « pas-à-pas, mètre par mètre » ‘’ Nelson Mandela’’. Nous allons le traquer avec la détermination de la jeunesse consciente de son avenir et du devenir du Gabon.


Monsieur le Président élu, que faut-il vous dire encore sur cette terre du Gabon qui vous a vu naitre et dans laquelle vous vous reposez désormais ? Tout simplement que je me révolte contre cette injustice du destin incompréhensible. Comme chaque larme fait suivre son sillon, vous avez mené le bon combat, Ce qui fait de vous désormais la bougie qui orientera le pas de l'espoir dans cette face de nuit du Gabon.

Pour terminer, Monsieur le Président élu, dans son éloge funèbre à Benjamin Franklin, en 1790, Mirabeau déclara : « Assez longtemps les cabinets politiques ont notifié la mort de ceux qui ne furent grands que dans leur éloge funèbre ; assez longtemps l'étiquette des cours a proclamé des deuils hypocrites : les nations ne doivent porter que le deuil de leurs bienfaiteurs ».

Au revoir! AMO.

Au revoir ! Monsieur le Président élu.

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