LES SIGNES QUE LE GABON VA MAL (ACTE V)LE SYMBOLE DE L'ATTENTISME, LE COMMUNIQUE FINAL DU CONSEIL DES MINISTRES

De manière universelle, si on demande a quiconque connaissant un peu le Gabon de décrire les caractéristiques de la société gabonaise, on s'entendrait dire que les gabonais manquent d'initiative, qu'ils n'ont pas le sens des affaires, qu'ils ne sont pas débrouillards, qu'ils sont bureaucrates, qu'ils aiment l'alcool, et que finalement le vœu par excellence de la majorité des gabonais soit d'être nommé en conseil des ministres. Ces caractéristiques peuvent être caricaturales, mais elles expriment aussi les dégâts que le parti unique et la dictature héréditaire ont faits en réduisant le peuple gabonais à une masse attentiste et dépendante du pouvoir. De tous les symboles de cet attentisme, le rituel entourant le communiqué final du conseil des ministres est le plus expressif.

1. Controller les gabonais grâce aux mesures individuelles ordonnées par la grâce du conseil des ministres
Les nominations en conseil des ministres au Gabon, ont la particularité d'englober de l'important et du trivial. C'est ainsi que l'on y nommera un ministre, un directeur d'administration, un PDG de société d'état ou parapublique et une secrétaire particulière, un chauffeur et un aide de camp. Tout y passe, nous l'avons dit, du trivial á l'important. Mais la question est de savoir pourquoi? Vu que l'usage veut que le président de la république au Gabon des Bongo, signe les décrets nommant ou promouvant les personnes aux plus importantes dignités du pays sans trop de délibération en conseil des ministres, il en découle donc un pouvoir énorme sur les gens ayant des ambitions d'ascension sociale au Gabon. Il faut donc plaire de la manière la plus ostensible possible aux Bongo, pour espérer le moindre petit recoin de pouvoir avec les prébendes qui vont de paires. La nomination en conseil des ministres sert une volonté de récupération politique et contrôle de cadres non partisans et partisans du régime en place. Cette stratégie de cooptation des cadres, même si elle ne réussie pas à capter tout le monde, a quand même un énorme effet d'entrainement car ceux qui restent sur le carreau voient leurs collègues s'enrichir et ils veulent faire comme eux, ce qui á termes crée le mimétisme entriste á la queue leu leu vers la soupe du pouvoir de la plupart des élites gabonaises. Dans un pays en crise économique depuis le début des années 80, ce pouvoir de nomination est un instrument de contrôle très efficace.

2. S'amuser à nommer les gens á court terme pour les avoir sur le qui vive á tous les instants
Que craint le plus un haut fonctionnaire qui a pris des habitudes bourgeoises? Perdre ses privilèges. Ce sont ces privileges que le régime Bongo utilise comme moyen de chantage aux gabonais. Pour que ce chantage marche, il faut créer dans l'administration, un climat et un espace de compétition larvée entre cadres. Au lieu de réfléchir sur les vrais problèmes du pays les cadres gabonais vont donc rivaliser en courtisanerie envers les Bongo. Les uns pour se ménager des circuits d’accès plus proches du centre du pouvoir, les autres pour monnayer leur capacité d'entrer en contact direct et formel avec les populations, ce qui est une très importante forme de monnayage politique. En cherchant à montrer au régime leur maîtrise des populations, ils expriment leur mérite de leur position dans les instances dirigeantes du pays. Par conséquent, progressivement, les critères de jugement des cadres cooptes par le pouvoir finissent ne plus rien à voir avec les compétences requises pour l'avancement du pays.

Si on ne veut pas être mal vu chez les Bongo, il faut répondre présent aux assemblées générales et aux séminaires en tout genre aussi inutiles les uns que les autres, vêtu de sa chemise Bongo. Nous nous retrouvons donc avec un pays dont les cadres et la population passent leur temps à attendre les communiques finaux du conseil des ministres car c'est de la que découlent les sésames menant aux biens matériels au Gabon.